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l’homme et la terre. — russes et asiatiques

Ce fut l’origine de la nouvelle religion du patriotisme slave. Puis d’autres savants découvrirent les « frères » de l’Austro-Hongrie, on étudia leurs mœurs, leurs coutumes, leurs légendes, et des sociétés se fondèrent en Russie pour aider ces compatriotes lointains et leur donner conscience de la grande nationalité slavonne. On glorifia les Serbes, on s’éprit des Monténégrins. Mais, par un
Cl. du Globus.
jeunes gens bulgares
phénomène de psychologie facile à comprendre, les Polonais, pourtant une nation slave s’il en fut, restèrent tacitement exclus de la grande confraternité : leur patriotisme national, pour lequel ils avaient tant de fois combattu, les rendait peu dignes d’entrer dans la famille ; on leur reprochait aussi de ne pas professer la religion orthodoxe, ce qui du reste est aussi le cas pour les Slaves plus éloignés de la Russie, les Croates et les Tchèques. Certes, les panslavistes russes auraient tout intérêt à rendre leur grand empire sympathique aux Slaves occidentaux, à le faire aimer et invoquer comme protecteur éventuel en cas d’oppression de la part des Germains ou des Magyars. Mais l’empire russe n’est point aimable, et du côté de l’Occident surtout il se montre par son caractère hostile et menaçant.

L’obstacle capital à la propagation du panslavisme est le même qui se dresse en travers de la marche du pangermanisme, et, en Russie, il est bien autrement difficile à écarter. Le caractère despotique de l’empire, à tous les points de vue, traditionnel, militaire, administratif, religieux même,