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l’homme et la terre. — les communes

devint le siège principal des diètes et des conseils ainsi que de la cour d’appel, prend part aux mêmes opérations ; elle détient le rang économique de « Reine de la Hanse » et, dans la mer Baltique, au milieu du treizième siècle, la « Wisby dorée », la puissante capitale de l’île Gotland et de tout le « tertial » hanséatique de l’Europe nord-orientale, « où les porcs mangeaient en des auges d’argent », devient le grand dépôt du commerce de l’Allemagne avec la Scandinavie, la Finlande, l’Ehstonie, la Livonie et « Messeigneurs » Pskov et Novgorod. Les « droits » de Wisby sont acceptés comme le code maritime de tous les navigateurs de la Baltique. Puis l’influence des marchands d’Allemagne domiciliés dans les comptoirs étrangers réagit sur la mère-patrie, et de nombreuses villes germaniques s’associent successivement sous le patronage de saint Nicolas et sous l’hégémonie des deux cités de Lubeck et de Hambourg, centralisant, celle-ci le commerce de la mer du Nord, la première celui de la mer Orientale.

Vers 1250, la confédération comprend dans l’Europe centrale plus de soixante-quinze villes dont l’alliance économique se transforme naturellement en ligue politique ; la conscience de leur force permet aux puissants bourgeois d’intervenir dans les événements contemporains et d’exprimer leur volonté, souvent appuyée sur des bandes militaires, recrutées à prix d’achat. En 1362, la flotte hanséatique venge des offenses commerciales sur la ville de Copenhague, que l’on dépouille de ses cloches, et bientôt après, les cités liguées imposent au Danemark un traité humiliant qui assure pour un temps la domination politique de la Hanse sur toute la Scandinavie.

Quelques-uns des comptoirs étrangers de la Hanse étaient de véritables colonies, entre autres des villages de pêche fondés dans les îles de Moen, de Bornholm, ainsi que dans la péninsule suédoise de la Scanie. Le dépôt de Bergen, en Norvège, n’avait pas moins de 3 000 résidants, immigrés d’Allemagne, et constituant deux petites républiques d’employés célibataires. De moindres établissements s’échelonnaient le long des côtes, en Angleterre, dans les Pays-Bas, en France dans les ports de Harfleur, Honfleur, La Rochelle, et jusqu’en Portugal. Dans les plaines orientales de l’Europe, la Hanse germanique étendait indirectement son empire sur les mille associations ou « artels » de chasseurs, pêcheurs, artisans de toute espèce, fixes, mobiles ou même errants, qui apportaient le produit de leur industrie dans les villes de marché. La France du nord avait