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l’homme et la terre. — le dix-huitième siècle

d’une transformation prochaine, voulut faire à tout prix un lieu de délices, un paradis de liberté, d’abandon fraternel et d’amour ; enfin James Cook, marin d’une audace et d’une sagacité sans égales, ne laissa plus guère de problèmes géographiques a dévoiler dans l’immense étendue du Pacifique ; il franchit même (1773) le cercle polaire méridional, poussa jusque dans les glaces antarctiques à la recherche du grand continent boréal, et, le premier parmi les navigateurs, fit le tour du monde dans le sens de l’ouest à l’est, contrairement au mouvement des alizés.

C’est à James Cook qu’est également due la délimitation vers l’Orient du continent australien. Les Portugais établis aux Indes orientales au seizième siècle avaient certainement notion d’une grande terre, dont ils apercevaient quelques caps à moins de 300 kilomètres au sud-est de Timor. Leurs successeurs, les Hollandais, firent, dans leur période héroïque, de nombreuses expéditions pour étudier les abords de ce territoire ; à la suite des deux voyages de Tasman (1642-1644), les côtes de la Nouvelle Hollande étaient vaguement relevées sur plus de la moitié de sa périphérie, du détroit du Torres à la terre alors appelée Van Diemen, du nom du gouverneur établi à Batavia. Mais le littoral reconnu était le moins hospitalier de cette terre qu’on pensait généralement s’étendre jusqu’au pôle sud, et cent vingt années s’écoulèrent avant qu’une nouvelle exploration fût faite. En 1770, Cook explora la côte orientale et aborda à Botany-bay. Les premiers immigrants, venant d’Angleterre, s’installèrent en 1788, mais c’est réellement au dix-neuvième siècle seulement que l’intérieur fut visité : alors commencèrent les difficultés particulières que devait y rencontrer l’Européen.

À cette conquête extensive du monde par les grands explorateurs correspondait en Europe l’étude intensive des lieux, des montagnes, de tous les phénomènes terrestres. Martel dressait en 1741 le « plan des glacières de Chamouny et des plus hautes montagnes »[1], puis Horace de Saussure parcourait les Alpes en savant et, après Balmat, s’attaquait au géant des « montagnes maudites », le mont Blanc, récemment découvert par les Anglais Pococke et Wyndham ; Franklin, Nollet jouaient avec la foudre, et Montgolfier lançait des ballons dans l’atmosphère. Certainement des essais du même genre avaient eu lieu aux époques

  1. Joseph et Henri Vallot, Annuaire du Club alpin français, 1894.