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l’homme et la terre. — colonies

même par se contenter d’une simple figuration de cérémonie publique en se bornant à symboliser la conquête et la conversion. En 1538, le moine Marcos de Niza, qui, le premier, s’avança sur une colline d’où l’on apercevait au loin l’un des villages du mystérieux pays de Cibola, au nord du rio Grande, entassa quelques pierres à la hâte pour y planter deux branches en forme de croix et s’emparer officiellement du « nouveau royaume de saint François », représentant les pays
Cl. Sellier.
pierre du calendrier mexicain
actuels du Nouveau Mexique et de l’Arizona. Puis, aussitôt après, il s’enfuit « avec plus de frayeur que de vivres », comme il le dit lui-même[1].

La conversion voulue par les Espagnols s’accomplit d’autant plus rapidement que les indigènes vivaient depuis longtemps sous l’empire des hallucinations religieuses, ne s’étonnaient d’aucun miracle et se prosternaient volontiers devant toutes les idoles nouvelles avec la même foi que devant les anciennes. Les Espagnols, voulant faire croire aux Indiens que le blanc était un être immortel, quoique maint cadavre des leurs fût resté dans les combats, se gardaient bien d’exposer le crucifix[2], mais ils exhibaient d’autant plus l’image de la Vierge Marie ou « Grande Dame », la Tegleciguata qui, plus tard, même pendant la guerre de L’indépendance du Mexique, devint la patronne du peuple sous le nom de Notre Dame de Guadalupe.

Au point de vue religieux, les Aztèques et autres indigènes du pays connaissaient assez les horreurs des sacrifices humains pour accepter

  1. A. F. Bandelier, Mémoires divers ; F.-W. Hodge, The American Anthropologist, april 1895, vol. VIII, n° 2.
  2. Remesal ; — Aubin ; Mémoire sur la Peinture didactique.