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indigènes des canaries

utilisée par les teinturiers. Cependant, les Canaries ont acquis une grande valeur comme pépinière naturelle pour la transplantation dans le Nouveau Monde des espèces précieuses de l’Ancien : la canne à sucre, la banane des sages et autres plantes des Indes ne sont devenues américaines qu’après un stage dans l’archipel canarien.

Sur la côte africaine, l’œuvre de découverte se poursuivait lentement, et l’on comprend qu’il en fût ainsi puisque, sous ces
Document comm par Mme Astier.
grotte anciennement habitée par les guanches
près de Las Palmas, Gran Canaria.
latitudes, les rivages sableux ne peuvent donner accès qu’aux solitudes immenses du Sahara. D’ailleurs, on craignait de s’aventurer vers le brûlant équateur, où, d’après les antiques traditions, la chaleur était tellement forte que nul organisme ne pouvait résister. Les marins portugais, qui devaient plus tard se distinguer entre tous par leur audace, étaient encore au commencement du quinzième siècle très inférieurs aux matelots de Gênes, de Venise, des Baléares, et lorsque l’infant Henri qui, en sa qualité de grand maître de l’ordre du Christ, était chargé des entreprises de découverte, s’installa au promontoire de Sagres avec des savants de tous pays, qu’il fonda à côté de son château un observatoire, une école navale, et rassembla une riche bibliothèque, lorsqu’il organisa enfin ce qui devait être l’œuvre de sa vie, l’exploration de la côte africaine, il dut faire venir un cartographe de Majorque, « maître Jacob », pour que celui ci enseignât aux navigateurs portugais l’art de lire les cartes terrestres et célestes.

Avant la prise de Ceuta, en 1415, les Portugais ne dépassaient pas encore, au sud du Maroc, le cap Nun, c’est-à-dire le « non ». le