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l’homme et la terre. — chevaliers et croisés

Nicée, ne pouvant se passer de l’appui des Grecs pour leurs approvisionnements, durent, bien à contre-cœur, rendre hommage à l’Empereur Alexis comme à leur maître, et promettre solennellement de lui remettre toutes les places ayant déjà fait partie de l’empire d’Orient et dont ils feraient la conquête. Ils promirent, sachant d’avance que le légat du Pape, qui les accompagnait, les délierait au besoin de leur serment. Alors commença la véritable campagne : ils
combat des croisés et des sarrasins
(Vitrail de Saint-Denis).
prennent Nicée, puis, en une grande bataille, culbutent les Musulmans à l’intérieur de la Péninsule, franchissent les Portes Ciliciennes, dites par eux les « Portes de Judas », tant ils avaient raison de les craindre[1], occupent l’importante cité d’Edesse, qui les protège contre les ennemis venus d’outre-l’Euphrate, s’enferment dans Antioche dont ils s’échappent à grand peine par une victoire qui parut un miracle, et finalement, grâce aux dissensions des Musulmans entre eux, — d’un côté les Fatimites d’Egypte, de l’autre les Turcs d’Asie — ils arrivent devant Jérusalem qu’ils emportent d’assaut et emplissent de sang ; dans le temple même, « les chevaux y baignaient jusqu’aux genoux ». En commençant le siège les Croisés n’étaient plus que vingt mille ; bientôt il ne resta dans Jérusalem que cent chevaliers et un millier de fantassins. L’armée s’était fondue, et le Saint-Sépulcre ne tenait plus à la chrétienté que par un fil bien facile à rompre.

Tout était perdu si les intérêts du commerce n’avaient appuyé ceux de la foi. Mais les flottes de Gênes et de Pise s’étaient amé-

  1. W. M. Ramsay, Geographical Journal, oct. 1903.