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l’homme et la terre. — chevaliers et croisés

que les chrétiens orientaux considéraient comme une superstition judaïque, fit éclater comme un tonnerre la désunion préparée depuis des siècles, et de part et d’autre on se lança des anathèmes. Le schisme était consommé. C’était en 1054, au milieu du onzième siècle, à l’époque où la puissance papale était en plein ascendant : la scission des deux cultes était déjà si bien établie dans les masses profondes du
icône catholique romaine
bas clergé et des peuples eux-mêmes que le prestige du pontife de Rome dans tout le monde occidental ne souffrit nullement de la séparation officielle.

Pendant le cours des siècles, les évêques de Rome avaient graduellement profité de l’avantage exceptionnel que leur avait valu la translation de l’empire à Constantinople et de la longue vacance du trône d’Occident : ils étaient les « premiers dans Rome ». et Rome était la première des cités, ils gagnaient incessamment en autorité et en sainteté auprès des fidèles de tous les royaumes de l’Occident. D’ailleurs, ils avaient su profiter de nombreuses occasions faciles pour devenir princes parmi les princes. Dès les premiers siècles, ils avaient pu s’ériger en grands propriétaires, mais leurs domaines ou « patrimoines » ne leur appartenaient que sous la souveraineté des exarques de Ravenne et des empereurs d’Orient. Menacés dans leurs possessions et privilèges par les rois lombards, ils invoquèrent l’appui de Pépin le Bref qu’ils aidèrent à faire roi et qui, en échange, leur assura la possession des « Marches » entre Ancône et Ravenne. Le « pouvoir temporel » des papes était fondé et bientôt s’accrut notablement, grâce à Charlemagne qui reçut la couronne des mains de Léon III. Celui-ci resta simple vassal, il est vrai, au point de vue purement terrestre, mais s’il con-