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l’homme et la terre. — orient chinois

et l’industrie presque générale est devenue forcément la domestication et la garde des bestiaux ; le sol se prête aux déplacements, et l’épuisement des sources, l’appauvrissement temporaire des pâturages tondus par la dent des animaux obligent les indigènes à la vie nomade ou du moins à un changement régulier de résidences fixes. Et quelles que soient l’origine première et l’apparence physique des peuples de ces contrées, ils sont toujours amenés à pratiquer le même genre de vie nomade, conforme à l’ambiance : Aryens, Turcs et Mongols mènent également l’existence de pasteurs errants dans les milieux qui la déterminent.

Outre les hordes pastorales, il y avait également dans ces contrées, à l’origine des temps historiques, des populations de mineurs. Le Kuen-lun avait ses carriers qui poursuivaient les veines de jade et sans doute aussi ses chercheurs d’or. L’Altaï, entre la Sibérie méridionale et la Chine, nous apparaît peuplé de mineurs à l’aurore de l’histoire : les paysans russes donnent à ces devanciers de leur race le nom de « Tchoudes », dont on relève les traces de la haute vallée de l’Amur à la mer Baltique.

Les Tchoudes altaïens recueillaient le minerai d’or et de cuivre, ce qui leur assurait à cette époque une influence très grande dans l’économie du monde entier ; cependant leurs trésors devaient être répartis sur le continent par l’intermédiaire de marchands et de pasteurs, car la légende ne les mentionne que d’une manière très indirecte, et les fables qui les entourent en font des génies ou des nains, très distincts des autres hommes. On a retrouvé dans les mines de Zmeinogorsk, qui, pendant la deuxième moitié du dix-huitième siècle, furent les plus productives du monde en plomb argentifère, des instruments en cuivre qu’employaient les mineurs, d’une façon très primitive d’ailleurs, ainsi qu’on a pu le constater par la découverte d’un squelette ayant encore à côté de lui ses outils et le sac de peau où il plaçait le minerai (Pallas). Les procédés suivis par les Tchoudes pour le lavage des sables aurifères et la fusion du minerai étaient tellement incomplets qu’en beaucoup d’endroits les mineurs saxons et leurs élèves, les industriels russes, ont trouvé grand profit à reprendre les mines abandonnées. En outre, ils se sont attaqués à un autre métal, le fer, que les primitifs n’avaient pas encore appris à dégager de ses combinaisons, et qui depuis a pris dans le travail du monde une part bien autrement impor-