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l’homme et la terre. — orient chinois

planète alors inconnues des historiens de langue grecque et latine. Les moyens actuels d’investigation dans le passé ne permettent que des hypothèses sur les événements qui eurent lieu dans les continents et dans les îles lointaines, par delà les mers ; du moins savons-nous que les conditions géographiques du milieu, si différentes qu’elles aient pu être dans leur infinie complexité, ont déterminé cependant la vie des peuples de ces contrées suivant des procédés analogues à ceux qu’a développés la civilisation méditerranéenne.

L’ignorance cinquante fois séculaire dans laquelle les hommes de l’Occident vécurent au sujet de leurs frères de l’Orient explique comment on a pu s’imaginer, depuis que les récits de Marco Polo révélèrent la Chine à l’Europe, qu’il n’y avait jamais eu pendant le cours de l’histoire de relations directes entre les deux versants, atlantique et pacifique, de l’Ancien monde, et que deux humanités distinctes, l’une la blanche, et l’autre la jaune, s’étaient développées parallèlement dans leurs continents respectifs. Quelle que fût la théorie professée relativement aux origines premières, on s’en tenait comme à un fait incontestable à celle de la parfaite indépendance réciproque de deux races foncièrement différentes. Mais les recherches de la science contemporaine ont démontré l’existence de routes bien tracées entre l’Occident et l’Orient, et, sur chacun de ces chemins, elles ont trouvé des marques évidentes d’un va-et-vient des nations, quelquefois très actif, bien que les annalistes du temps n’en aient point fait mention. En outre, l’étude plus approfondie de chaque peuple, de ses légendes et de ses lambeaux d’histoire, de ses mœurs, de ses coutumes, de ses connaissances et de ses procédés industriels a permis de constater des phénomènes de filiation directe et d’enseignement mutuel entre ces nations considérées jadis comme tout à fait à part en des milieux fermés. Désormais on ne saurait plus nier la parenté première entre le monde occidental et le monde chinois.

D’abord l’étude du relief géographique montre que, pour la facilité des communications, le versant oriental de l’Ancien Monde est bien rattaché au versant occidental. À cet égard il est beaucoup plus favorisé que ne l’est la péninsule indienne, presque fermée du côté de la terre, accessible seulement du côté de la mer. Autrefois l’Inde n’était en relations directes avec l’Asie antérieure et avec l’Europe que par l’intermédiaire de la Bactriane ; les déserts de l’Iranie forçaient les