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John Brown était un de ces rudes travailleurs américains que leur éducation dans une société libre rend propres aux occupations les plus diverses. Élevé comme trappeur dans les forêts de l'Ouest, il se fit successivement tanneur, berger, marchand de laines, fermier ; souvent aussi il changea de résidence, habitant tour à tour le Connecticut, l'Ohio, l'État de New-York, la Pennsylvanie et dans ses voyages de commerce, il traversa même l'Atlantique pour visiter l'Angleterre, la France et l'Allemagne. Revenu d'Europe en 1849, il s'établit près du village de North-Elba (New-York), dans un froid vallon des montagnes d'Adirondack, et là, aidé de sa vaillante femme et de ses dix enfants, il se mit à défricher le sol et à soigner le bétail.

Mais ce paysan était en même temps un citoyen. Plein du sentiment de ses devoirs envers la société, il voulait, avant toutes choses, travailler au bonheur de ses compatriotes, contribuer pour sa part à la grande œuvre de l'amélioration du genre humain. La haine de l'injustice le pénétrait, et, dans ses conversations, il ne cessait de rappeler les souffrances des faibles et des opprimés. Il élevait ses enfants à la mission de redresseurs de torts, il avait fait du dévouement héroïque à la cause des malheureux, l'âme même de la famille, le génie du foyer domestique.

Et cependant, autour de lui, dans les libres communes des États du Nord, il ne voyait guère que des indices de prospérité. Les cultivateurs,