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l’île en forme d’éperon. À gauche, le moindre bras, qu’on appelle le petit Rhône, est néanmoins un puissant cours d’eau, plus fort que la Garonne, la Loire ou la Seine ; à droite, le grand Rhône fuit sous le regard jusqu’à un rivage indistinct bordé de saules que recouvre à demi le vaporeux de l’espace. Dans le cercle immense de l’horizon, on n’aperçoit que l’eau ou bien les terres apportées par le fleuve et déposées couche à couche, molécule à molécule ; seulement à l’est, on distingue quelques-unes des cimes rocailleuses des Alpines, bleues comme le ciel, et vers le nord apparaissent vaguement les cimes coniques de Beaucaire, au pied desquelles commence l’ancien golfe marin que les alluvions du fleuve ont peu à peu comblé. Îles, presqu’îles, berges, tout est composé de sable noirâtre dont le Rhône et ses affluents ont opéré le mélange, après avoir reçu des torrents supérieurs les roches triturées des Alpes, du Jura, des Cévennes. La grande terre de Camargue, dont