Page:Reclus - Histoire d’un ruisseau.djvu/303

Cette page a été validée par deux contributeurs.

les cailloux blancs, le sable et les herbes frémissantes de son lit ; elle murmure doucement entre les roseaux ; les poissons s’élancent à travers le flot comme des flèches d’argent et les oiseaux le rasent de leurs ailes. Des fleurs naissent en touffes sur ses bords, des arbres pleins de sève étalent au loin leur branchage, et le promeneur qui suit la rive peut à son aise se repose à leur ombre en contemplant le gracieux tableau qui s’étend entre deux méandres. Combien différent est le ruisseau sous le pavé retentissant des villes ! L’eau est bien la même en substance, mais seulement pour le chimiste ; elle est mélangée de tant d’immondices qu’elle en est devenue visqueuse. Plus de lumière dans la sombre avenue, si ce n’est de distance en distance un rayon qui passe entre deux barreaux de fer et se répercute sur la paroi gluante. La vie semble absente de ces ténèbres ; elle existe pourtant : des champignons, nourris de pourriture, se blottissent dans les coins ; des rats se cachent dans les