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nous dûmes nous résigner à partir honteusement, en jetant un dernier regard de courroux sur le tronc d’arbre qui tournoyait toujours. Avant de se décider au départ, il attendait que le courant eût changé de niveau.

Non-seulement, l’eau s’écoule par des sinuosités sans fin, méandres, tourbillons et remous, mais aussi toute impulsion venue du dehors se propage en courbes et en rondeurs à la surface du ruisseau. Qu’une feuille tombe d’un arbre, qu’un grain de sable se détache de la berge, et sous le poids du faible objet, l’eau se plisse légèrement. Autour de la dépression, se dresse un rebord circulaire, entouré lui-même par une petite fosse. Un second anneau concentrique, puis un troisième, puis un autre et d’autres encore se forment autour du premier ; la surface entière du ruisseau se couvre de ronds, de plus en plus larges, espacés, indistincts. En frappant contre le rivage, chaque ourlet de l’eau se réfléchit en sens inverse et croise les vaguelettes qui le suivaient ; d’autres séries de plis