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HISTOIRE D’UNE MONTAGNE.

tantes, que l’air est rajeuni, pour ainsi dire. Le profil de rochers et de neiges se détache nettement du bleu des cieux ; malgré l’énorme distance, le mont, azuré lui-même comme les profondeurs aériennes, se peint sur le ciel avec tout son relief d’arêtes et de promontoires ; on distingue les vallons, les ravins, les précipices ; parfois même, à la vue d’un point noir qui se déplace lentement sur les neiges, on peut, à l’aide d’une lunette d’approche, reconnaître un ami gravissant la cime. Le soir, après le coucher du soleil, la pyramide se montre dans sa beauté la plus pure et la plus splendide à la fois. Le reste de la terre est dans l’ombre, le gris du crépuscule voile les horizons des plaines ; l’entrée des gorges est déjà noircie par la nuit. Mais là-haut tout est lumière et joie. Les neiges, que regarde encore le soleil, en réfléchissent les rayons roses ; elles flamboient, et leur clarté paraît d’autant plus vive que l’ombre monte peu à peu, envahissant successivement les pentes, les recouvrant comme d’une étoffe noire. À la fin, la cime est seule assez haute pour apercevoir le soleil par-dessus la cour-