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HISTOIRE D’UNE MONTAGNE.

La montagne protectrice leur procure les moyens de s’abriter contre l’invasion. Elle défend la vallée par d’étroits défilés d’entrée où quelques hommes suffiraient pour arrêter des bandes entières ; elle cache ses vallons fertiles dans les creux de hautes terrasses dont les escarpements semblent ingravissables ; en certains endroits, elle est perforée de cavernes communiquant les unes avec les autres et pouvant servir de cachettes.

Sur la paroi d’un défilé, que je visitais souvent, se trouvait une de ces forteresses cachées. C’est à grand’peine si je pouvais en atteindre l’entrée en m’accrochant aux anfractuosités du roc et en m’aidant de quelques tiges de buis qui avaient inséré leurs racines dans les fentes. Combien plus difficile en eût été l’escalade à des assiégeants ! Des blocs, entassés à la porte de la grotte, étaient prêts à rouler et à rebondir de pointe en pointe jusque dans le torrent. De chaque côté de l’entrée, la roche, absolument droite et polie, n’eût pas laissé passer une couleuvre ; au-dessus, la falaise surplombait et, comme un porche gigantesque, protégeait l’ouverture. En