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HISTOIRE D’UNE MONTAGNE.

le voyageur remarque tout d’abord combien peu nombreuses sont les plantes qui lui tiennent compagnie jusqu’au sommet. Celles qu’il a vues à la base et sur les premiers escarpements, il ne les revoit pas sur les pentes plus élevées, ou, s’il en est encore quelques-unes, elles disparaissent dans le voisinage des neiges, pour être remplacées par d’autres espèces. C’est un changement continuel dans l’aspect de la flore, à mesure qu’on se rapproche des froides cimes. Même lorsque la plante des collines inférieures continue de se montrer à côté du sentier voisin des neiges, elle semble changer peu à peu ; en bas, sa fleur est déjà passée, tandis que, sur les hauteurs, elle est à peine en bouton ; ici, elle a déjà fourni son été ; là-haut, elle est encore à son printemps.

Ce n’est pas au cordeau que l’on pourrait mesurer la hauteur exacte à laquelle telle plante cesse de croître, telle autre commence à se montrer. Mille conditions du sol et du climat travaillent à déplacer incessamment, à écarter ou à rétrécir les limites qui séparent le domaine naturel des différentes espèces.