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LES NEIGES.

Mais l’homme continue de parcourir les routes qui, de gorge en gorge, de contrefort en contrefort, s’élèvent jusqu’à une brèche de la crête et redescendent sur l’autre versant. Pendant la belle saison, quand les torrents joyeux bondissent en cascades à côté du chemin, même les voitures traînées par des chevaux aux grelots retentissants peuvent gravir sans peine les rampes établies à grands frais sur les escarpements. Quand les neiges ont recouvert la route, il faut changer les véhicules ; les chars et les voitures sont remplacés par des traîneaux qui glissent légèrement sur les flocons entassés. La traversée des monts ne se fait pas moins rapidement que pendant les jours les plus chauds de l’année ; à la descente, elle s’accomplit avec une vitesse qui donne le vertige.

C’est en voyageant ainsi en traîneau par-dessus les cols de la montagne qu’on peut apprendre à bien faire connaissance avec les grandes neiges. La charpente légère glisse sans bruit ; on ne sent plus les chocs des ferrailles sur le sol résistant, et l’on croirait voyager dans l’espace, emporté comme un es-