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LES NEIGES.

mêmes sont ensevelis ; la glace de leur surface porte d’énormes couches de neige, et souvent on ne sait même plus où se trouve l’emplacement des bassins ; peut-être une fissure permet-elle de voir au fond d’un gouffre la surface du lac, tranquille, noire, sans reflets ; on dirait un puits, un abîme sans fond.

Au-dessous des grands sommets et des cirques supérieurs, où la neige s’entasse en couches hautes comme les maisons, les forêts de sapins se montrent çà et là, mais à demi seulement. Sur chacune de leurs branches étalées, les arbres portent tout le fardeau de neige qu’ils peuvent soutenir sans rompre ; ensemble, les branchages entremêlés forment comme des voûtes sur lesquelles les amas de cristaux neigeux se groupent en coupoles inégales ; quelques tiges rebelles seulement échappent à la prison de glace et dardent dans l’air libre leurs flèches d’un vert sombre, presque noires, et portant chacune à son extrémité un lourd paquet de neige, Quand le vent souffle au milieu de ces tiges, il en tombe avec un bruit métallique des fragments de neige glacée ; un mouvement général de vibration