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LES NEIGES.

qui passe en emporte goutte à goutte les débris souillés.

Ces neiges de quelques jours sont charmantes à voir. On aime à en suivre du regard le décor changeant ; elles ne se montrent, en effet, que pour disparaître bientôt. Pour contempler les neiges sous leur véritable aspect et les comprendre dans leur travail comme agents de la nature, il faut les voir en hiver dans la dure saison des froids. Alors tout est recouvert de couches énormes d’eau cristallisée en aiguilles et en flocons ; la montagne, ses contreforts et les collines de sa base, ne se montrent plus sous leur forme réelle. La masse épaisse qui les cache en oblitère le relief et leur donne de nouveaux contours. Au lieu de saillies, de dentelures, de pointes au profil déchiqueté, le penchant du mont se développe maintenant en ondulations charmantes, en croupes d’un dessin hardi, mais toujours sinueux. De même que l’eau, sous l’influence de la pesanteur, équilibre son niveau pour s’étaler en surface horizontale, de même la neige, obéissant à ses lois propres, se dépose en couches aux renflements arrondis. Le vent,