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FRANCE.

qui va rejoindre la Bourne dans l’étrange ville de Pont-en-Royans.

Entre le Vercors et le Dévoluy sont les monts fantastiquement pittoresques du pays de Trièves.


Hauts de 1 000 à plus de 1 500 mètres, et même de 2 000, les Monts de la Drôme, eux aussi, sont faits de parois imitant de loin des monuments, des obélisques, des bastions, des citadelles ; ils ont des gorges désordonnées, cassées, heurtées, stériles le plus souvent, par instants touffues, et déjà méridionalement lumineuses ; on y voit des torrents à cascades, des flots bouillonnants sortant de la roche avec un volume de rivière, éternellement abreuvés qu’ils sont par les scialets, c’est-à-dire par les entonnoirs où tombent les eaux des forêts, des plateaux, des ravins supérieurs. Leurs escarpements les plus magnifiques ferment l’orient de Die, ville sur la Drôme. Ils s’appellent Mont Glandaz (2025 mètres) ; or dirait de loin les murs, les redans, les tours, les retraits d’un fort sans pareil ; et cette puissante architecture est chaudement colorée. La forêt de Saou est un cirque, jadis sombre de bois, dont les pentes se relèvent contre la montagne de Rochecourbe (1 622 mètres) : longue d’environ 12 kilomètres, sur moitié largeur, elle n’a d’autre issue que le passage d’un torrent qui court au Roubion, tributaire du Rhône.


Malgré sa petitesse, le Dévoluy porte sur trois départements : les Hautes-Alpes, l’Isère et la Drôme. Ce stérile massif se sépare des monts de la Drôme au col de la Croix Haute (1 500 mètres d’altitude), dont profite le chemin de fer de Grenoble à Marseille. Il darde ses pics décharnés au nord-ouest de Gap et divise ses eaux entre le Drac, affluent de l’Isère, et le Buech, tributaire de la Durance : eaux rares d’ailleurs ; car le Dévoluy n’a plus d’arbres, et avec les arbres il a perdu les sources pérennes. Il perd aussi son reste d’humus, avec son humus ses