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FRANCE.


CHAPITRE IX

LES ANCIENNES PROVINCES


1o Importance des provinces : quoique mortes, elles vivent encore. Les petits pays. — Avant 1791, la France était partagée en trente-trois gouvernements fort inégaux : la province de Guyenne-et-Gascogne avait près de 6 750 000 hectares, tandis que le Comtat-Venaissin, entouré de terres françaises, mais appartenant encore au Pape[1], ne s’étendait que sur 181 000 hectares. L’une aurait donc contenu 37 à 38 fois l’autre. C’étaient les deux extrêmes.

Officiellement, ces provinces sont mortes depuis quatre-vingts ans passés ; mais elles vivent toujours dans la mémoire de la nation. Nous disons encore : Je reste en Touraine, je vais en Bourgogne, je viens du Limousin. Suivant notre pays d’origine, nous nous traitons de Normands, de Bretons, de Gascons, de Béarnais, de Comtois, de Poitevins, d’Angevins. Et récemment encore, quand il a fallu donner un nom aux Français ravis par la Prusse, nous les avons tout naturellement nommés Alsaciens-Lorrains. Fallait-il les appeler Haut-Rhénans, Bas-Rhénans, Meurthais ou Mosellois ? La plupart de nos départements ont des noms tels, qu’on n’en peut tirer que des dérivés ridicules : il est facile de désigner les gens des Vosges, de la Vendée, de la Savoie, de l’Aveyron, de la Corrèze, de la Creuse, de la Gironde ou des Landes ; mais que faire de ceux des Bouches-du-Rhône, du Pas-de-Calais, du Puy-de-Dôme, de Saône-et-Loire, de Seine-Inférieure ou d’Ille-et-Vilaine ?

  1. Il fut précisément annexé en cette année 1791.