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FRANCE.

basses qu’on appelle des lônes[1], terres de peu de consistance où nul ne sème ni ne moissonne ; leurs sables et leurs graviers portent, avec le saule, l’arbre vert, élancé, flexible au vent, mais sans couronne et sans branches étalées, le peuplier, qu’on trouve partout en France.

À Lyon, par 162 mètres, la Saône, bien que très inférieure au plus fougueux de nos fleuves, le tord droit au sud, tandis que depuis sa source il courait du nord-est au sud-est, non sans grands détours. Et de plus, elle contribue singulièrement à régulariser le grand torrent des Alpes et du Jura au-dessous de la cité qui les voit se réunir : c’est en été que le Rhône a le plus d’abondance, grâce à la fonte des neiges de la montagne, et précisément alors la Saône arrive à son minimum ; en revanche, pendant la saison d’hiver, le Rhône est au plus bas, tandis que la Saône verse en moyenne quatre ou cinq fois plus d’eau qu’en été. Il résulte de là qu’en aval de Lyon le fleuve fait de la rencontre du Rhône et de la Saône varie peu dans son débit moyen. Lyon, la cité de la soie, première ville de France après Paris, a tout l’aspect d’une grande capitale : sur un beau fleuve et sur une belle rivière, avec des faubourgs escaladant des escarpements de 100 à 150 mètres, une seule chose lui manque et manque encore plus à Paris, les grands navires de Marseille et de Bordeaux, ou même les bricks de Nantes. Si le Rhône lyonnais avait souffert des vaisseaux comme la Garonne ou la Tamise, Lyon, située sur un des grands chemins du Nord au Midi, dans une contrée magnifique, serait devenue l’une des métropoles de l’Europe ; elle eût régné sur la France, sans doute aussi sur la Suisse, et peut-être par Belfort sur le Rhin moyen, et par la Savoie sur la Haute-Italie. Les ponts que le fleuve y mord ont de 200 à 350 mètres, portée double de celle des ponts de la Saône.

  1. Ce mot se retrouve dans Saint-Jean-de-Losne, ville au bord de la Saône.