Page:Reclus - France, Algérie et colonies, 1886.djvu/185

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
182
GÉOGRAPHIE.

elle atteint la rive gauche de la Seine, qui déjà n’est plus un fleuve ; mais un bras de mer.


Canaux entre la Seine et les fleuves de son pourtour. — C’est le caprice qui semble mener les rivières tracées par la nature ; une règle sévère guide les canaux, qui sont des rivières tracées par l’homme.

L’homme les a précisément imaginés pour éviter aux bateliers les obstacles, les impossibilités, les crève-cœur, les périls de la navigation en rivière, dans les vallées à grande pente, dans les défilés, sur les eaux réduites par la sécheresse, loin des embrassements de la mer, qui par son flux rend des ruisseaux capables de porter des navires.

Avec eux plus de contre-courants, de rapides, de cascades, plus de longs détours, d’engravements, de chocs, de déchirures sur un lit raboteux et sans profondeur. Un canal est une suite de plans d’eau, de biefs toujours également larges, également profonds, sans pente, immobiles entre des talus souvent ombragés de grands arbres ; chaque bief finit par une porte d’écluse où l’eau tombe tout à coup de la hauteur que le canal aurait perdue depuis la porte précédente s’il avait suivi la pente de la vallée au lieu de rester toujours à son même niveau. Cette eau ne se jette point immédiatement dans le bief inférieur, elle s’abat dans un réservoir qu’une autre porte barre un peu plus bas, et qui s’ajuste facilement au niveau d’amont et au niveau d’aval : quand on ferme les vannes de la porte d’aval, celles d’amont restant ouvertes, ce réservoir monte au niveau du bief supérieur ; quand on les ouvre, celles d’amont restant fermées, il descend au niveau du bief inférieur. Ainsi, parties d’un fleuve comme la Seine, les embarcations peuvent, d’écluse en écluse, gravir sans peine un versant jusqu’au bief de partage, et, de ce bief, descendre à leur aise l’escalier des plans d’eau jusqu’au fleuve de l’autre versant. C’est au bief de partage qu’un canal passe d’un bassin dans