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GÉOGRAPHIE.

en courants terribles ; la Méditerranée elle-même, si clémente et si charmante, a quelquefois de subites fureurs. Mais 372 phares[1], lueurs fixes ou feux intermittents, brillent du haut de nos caps, du bord de nos îles, du piédestal des rocs qui sont l’avant-garde de la France ; et maintenant, sur cette rive où, il y a cent ans à peine, des barbares assommaient les naufragés, tranquille devant le complot des ténèbres, des vents et des vagues, le marin cherche sa route à ces étoiles de la mer.


2o La mer du Nord, le Pas de Calais, la Manche. — La mer du Nord est peu profonde, excepté dans le voisinage de la Norvège, que longe une fosse ayant 800 mètres de sonde. À 43 kilomètres à l’orient de Dunkerque, son rivage méridional cesse d’être belge pour devenir français.

Ce changement de souveraineté laisse la nature et l’homme intacts : sur les deux pays, à l’est comme à l’ouest, chez le Belge comme chez le Français, c’est toujours la Flandre, et, derrière les sables littoraux, la même plaine basse, ancien golfe de la mer.

Sous la même pâleur de ciel, ce sont les mêmes villages dont les villageois parlent flamand et parleront français : au moins dans notre Flandre à nous, qui renonce de plus en plus à son vieux nederduitsch. À trois cornes de la France, trois verbes meurent : le flamand à Dunkerque ; le breton en pays de Tréguier, en Léonnais, en Cornouaille, en terre de Vannes ; le basque en Labourd, en Soule, en Navarre ; et au quatrième coin, un patois, jadis langue, expire, le provençal que ses poètes, les félibres, ne ranimeront point.

Notre littoral de la mer du Nord a 72 kilomètres, de la frontière belge à Calais, ville devant laquelle cette mer s’étrangle et prend le nom de Pas de Calais. Il est fait de

  1. Avec 760 bouées et 1 450 balises, en 1878.