Page:Reclus - Examen religieux et philosophique du principe de l’autorité.djvu/34

Cette page a été validée par deux contributeurs.

sainte Jeanne d’Arc. Mais dirai-je les noms des martyrs ? Demande à Torquemada, demande aux Albigeois !

Quant au peuple, jamais il n’a reconnu l’homme de Dieu, et ne lui a crié : Salut, ô prophète ! que lorsqu’il l’a vu qui pendait tout sanglant du haut d’une croix. Qui dira vos douleurs, ô martyrs de la vérité, vous qui avez exercé la justice ! Vous avez été lapidés, vous avez été tués, vous avez été mis à mort par le tranchant de l’épée, vous avez été affligés, tourmentés, vous dont le monde n’était pas digne !

Oh ! quand je regarde les bourreaux vêtus de la pourpre rougie, dans le sang des martyrs, mon cœur tremble, et ma chair frissonne. J’ai frissonné d’angoisse et de colère, quand j’ai vu la Foi, sanglante Polyxène, qu’ils traînaient les mains liées derrière le dos, devant l’autel d’un noir fétiche à tête de serpent ; ils étendaient sur son visage le voile sombre du criminel, elle baissait la tête, puis le prêtre la maudissait, et le bourreau lui plongeait son couteau dans la poitrine.

Autorité, sanglante autorité, je ne te maudirai pas, car je te ferais haïr par les hommes faibles de foi, et il nous faut prier : Pardonne, ô Dieu, car ils ne savent ce qu’ils font, au bourreau pardonne, pardonne à cause de la victime !

En accusant l’autorité, j’accuse l’Humanité, et si je la maudissais, je maudirais ma mère. Car l’Humanité adore la Nécessité, les peuples adorent le Droit du glaive avec une ferveur effrayante et une immense lâcheté.

Tous, ils adorent l’égoïsme, qui s’impose aux autres égoïsmes, et marche au hasard à travers le monde, tous ils adorent le despotisme, sauf quelques hommes de désir