tête par un cordon. Ces enfants ne pleurent jamais.
Les maisons ressemblent à des ruches d’abeilles, chaque famille en a deux, celle du mari et celle de la femme. La femme ne s’enhardit jamais jusqu’à dépasser le seuil de la case maritale : elle dépose à la porte la nourriture qu’elle vient de préparer et que le noble mari lui fait la grâce de vouloir bien manger ; la femme est l’esclave du mari et toute jeune fille pauvre qui ne trouve pas de maître, devient de droit l’esclave du riche le plus voisin. Le système social de l’Europe se retrouve ici, mais incomparablement plus simple et dégagé de toutes les complications qui le défigurent chez vous.
Ils se disent chrétiens, mais ils ont encore leurs superstitions antiques. On dit qu’ils célèbrent des rites païens dans une grotte appelée Cansamarie. Le grand prêtre, ou Mamma, de San Miguel, qui me donnait l’hospitalité, m’étonna un soir en se tournant vers les pics neigeux et en faisant avec ses doigts tantôt étendus vers le ciel, tantôt appliqués sur son front et sur sa bouche, une foule de signes mystérieux. Les noms chrétiens des Aruacos ne leur servent que d’une manière officielle ; ordinairement ils se connaissent par des noms empruntés à la nature ou à quelque pratique superstitieuse. En ma qualité de légumiste, je passe chez les Aruacos pour un magicien… À plus tard d’autres détails.
Je t’embrasse, chère mère. J’embrasse aussi du fond du cœur mon bon père auquel je ne pense jamais sans une profonde émotion. J’aimerais tant à lui écrire des paroles douces à son cœur, mais je redoute de lui parler dans un langage qui n’est pas le sien. Chère mère, c’est toi que je charge de lui parler de mon amour de fils. Sois heureuse !
- Ton fils,