toutes les maisons ne se composent que d’un modeste rez-de-chaussée ; les vitres, les croisées sont inconnues, et les fenêtres, garnies de barreaux, donnent à la ville entière un air de prison. Il n’y a ni marché, ni halle, ni abattoir, ni fontaine, ni aucun édifice d’utilité publique ; les quatre mille habitants du lieu, presque tous noirs ou mulâtres, vivent dans l’ordure, la crasse et la puanteur. Riohacha jouit à tort selon moi d’une grande réputation de salubrité : les marécages et les salines qui l’entourent ne peuvent qu’empoisonner son atmosphère et, d’après les renseignements que j’ai recueillis, il se trouve que la mortalité y est encore plus forte qu’à la Nouvelle-Orléans. Dans la Sierra, au contraire, la température est aussi bonne et aussi salubre que dans nos Alpes ou nos Pyrénées.
Riohacha forme un petit monde à part, presque entièrement séparé du reste de l’univers ; par terre, il est difficile de voyager, car les voies de communication ne sont guères meilleures qu’elles ne l’étaient du temps de Colomb et d’Alfinger. Pour aller à Maracaybo, il faut choisir pour ami quelque brave Indien Goajire et se laisser guider par lui à travers les savanes et les marécages ; pour aller à Sainte-Marthe, il faut passer quinze embouchures de rivières et marcher à quatre pattes pendant plus d’une heure dans un défilé rocailleux appelé le défilé des Cordages. Le chemin de Valle Dupar ne vaut guère mieux ; toutes les marchandises se transportent fort mal à dos d’âne ou de mulet, et le sentier est parsemé des ossements des pauvres bêtes de somme qui sont mortes à la peine. Enfin, tu jugeras de l’état des chemins aux environs de Riohacha si je te dis qu’il n’y a ici en tout qu’une voiture et deux charrettes. La voiture n’a jamais servi, un richard l’a