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disputer pour savoir si un épi poussé à droite ou à gauche du sillon est bien à eux. Pas d’huissier, pas d’avoué, pas de notaire pour régler les intérêts entre les camarades. Après la récolte, avant l’époque du nouveau labour, ils se réunissent pour discuter les affaires communes. Le jeune homme qui s’est marié, la famille qui s’est accrue d’un enfant ou chez laquelle est entré un hôte, exposent leur situation nouvelle et prennent une plus large part de l’avoir commun pour satisfaire leurs besoins plus grands. On resserre ou l’on éloigne les distances suivant l’étendue du sol et le nombre de membres, et chacun besogne dans son champ, heureux d’être en paix avec les frères qui travaillent à leur côté sur la terre mesurée aux besoins de tous. Dans les circonstances urgentes, les camarades s’entr’aident : un incendie a dévoré telle cabane, tous s’occupent à la reconstruire ; une ravine d’eau a détruit un bout de champ, on en prépare un autre pour le détenteur lésé. Un seul paît les troupeaux de la communauté, et le soir, les brebis, les vaches savent reprendre le chemin de leur étable sans qu’on les y pousse. La commune est à la fois la propriété de tous et de chacun.

Oui, mais la commune, de même que l’individu, est bien faible si elle reste dans l’iso-