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114 Troisième Partie.

C’est cette brièveté de la vie qui nous exhorte toujours il la jouissauce : nous devons’<rem})lir de vin notre coupe, avant (jue notre mesure soit remplie ». (iuand l’âme monte sur les lèvres, qu’importe que ce soit à Nlsâpûr ou à Balh ? quand la mesure est pleine, qu’importe que ce soit d’un [vin] doux ou d un [vin] amer ? Bois du vin, car après moi et toi beaucoup de lunes seront dans leur croissant après avoir été à leur déclin, et seront à leur déclin après avoir été dans leur croissant ». (W. 134, Bd. 47.)

Cependant, une même pensée nous oppresse comme un cauchemar. « Toujours nous sommes assis, regrettant que nous sommes arrivés aussi tard et qu’il nous faut nous en aller aussi vite. »

(W. 45.)

Je vis un oiseau assis sur les remparts de Tus ; devant lui était le crâne de Kaikâûs.

Il parlait au crâne et disait : « Hélas, hélaa ! où est le tintement des cloches ? où est le son de la flûte ? » ’^ (W. 277.)

Ceux qui venaient, s’agitèrent et se laissèrent troubler par les doureurs de la vie, la joie et la jouissance. Ils burent une coupe et furent réduits au silence, la poussière de l’éternité les embrasse tous. (W. 237.)

Voilà le matérialisme absolu, le reniement de l’immortalité de l’âme, tout comme on le trouve chez Abu-l —’Alâ. Et ce n’est pas le seule exemple qu’on en puisse tirer des Rubâ’iyât :

Bois du vin, car tu dormiras assez sous le limon, sans camarade, sans compagnon, sans ami, sans intime. 1 Hâfi ? 307, 1 : « Lève-toi, et verse le vin joyeux dans la coupe d’or, avant que la coupe de ta tête soit remplie de poussière ».

L’expression « l’âme monte sur les lèvres » pour « la mort approche », est emploj’ée p. ex. dans le Mantiq-eftaïr v. 240. ^

Comp. le quatrain ambulant W. 392 qui est attribué à Hâfi ?.

Sahid (Morgenland. Forscb. 1875) : Hier je passais par hasard à travers les déserts près de Tus. J’y vis un hibou assis sur la place du coq. Je demandai : « Qu’a.s —tu à raconter de ce désert ? » — Il répondit : « J’ai ce mot à raconter : hélas, hélas I »