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NOTES.

la prudence, la vigueur et le courage nécessaires pour écarter ou surmonter les malheurs. D’après ces heureux attributs, il n’est pas étonnant que tous les savans Indiens et tous leurs copistes placent une invocation à ce dieu au commencement de leurs écrits. Chez les Malabars, cette invocation est ainsi conçue : Sri fou Chri) Gœnavadayé namâ [Adoration du bienheureux dieu Gænavadi], ou simplement Gœnavadayé namâ [Adoration de Gænavadi ou de Ganesa]. Ce dieu se nomme encore Gourou [Maître, Directeur], parce qu’il prépare la voie des affaires, et’instruit les ignorans ; de là ce protocole usité non-seulement parmi les Indiens, mais aussi chez les Tibétains, Namo Gourou [Adoration du Maître], corruption tibétaine des mots sanskrits Namâ Gourou, ou Sa/ Gourouve namâ [Adoration du vrai Maître]. Cette corruption paroît au P. Paulin de Saint-Barthélemi être une nouvelle preuve que les Tibétains ont reçu leur religion des Indiens, loin que ceux-ci soient redevables de la leur aux Tibétains, comme l’ont rêvé, dit-il, de Paw et Bailly. Au reste, ce savant, qui nous fournit les principaux matériaux de cette note, partage si fortement l’opinion de M. Jones touchant l’identité de Ganeia et de Janus, qu’il lui reproche de l’avoir énoncée avec trop d’obscurité et de timidité. Janus, dit-il, étoit la plus ancienne divinité des Romains ; il est aussi adoré chez les Indiens, et il aura probablement passé de la mythologie des Brahmanes dans celle des Grecs, et de là dans celle des Latins : car Macrobe nous apprend que Janus et Saturne sont deux divinités étrangères ; Juvénal appelle Janus le plus ancien des dieux [antiquissime divùm], Le nombre 365, qu’on lui plaçoit entre les mains, justifie pleinement l’influence que les Indiens lui attribuent sur les nombres et les calculs, À l’épithète de Gœnadhiba [maître des nombres, des comptes, des réunions], on peut encore ajouter celle de Dvaymâdoura [ayant deux mères]. L’une de ces deux mères est Pârvatî, ou la Lune ; et l’autre, Anga, épouse du roi Daçaprayâvadi, dont les amours avec Pârvatî forment une fable astronomique, et purement relative aux effets de la lune. Cette dernière épithète, suivant notre auteur, semble expliquer les deux visages que l’on donnoit au Janus romain. L’auteur de l’Origine de tous les cultes (tome III, page 47, et II.e partie, page 59) regarde Janus muni de sa clef et chef des douze mois de l’année, comme le prototype de Saint Pierre.

(15) Le même dictionnaire sanskrit que le P. Paulin de Saint-Barthélemî appelle Amarasinha, et dont il a publié la i.re partie in-4.° à Rome en 1798. Voyez, pag. 430-432, ma note 61 sur le Traité de la littérature des Hindous.