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DE L’ITALIE ET DE L’INDE.

secours, nous pouvons, en toute sûreté, dériver Nilus du mot sanskrit nîla [bleu], puisque Denys le Périégète nomme expressément ce fleuve un courant d’azur ; et si nous nous en rapportons à la version italienne du Râmâyan par Marco, le nom de Nîla se donne à une montagne haute et sacrée, dont le sommet est d’or pur, et d’où couloit un fleuve d’eau douce, limpide et fraîche. M. Sonnerat(167) renvoie à une dissertation de M. Schmidt, couronnée par l’Académie des inscriptions, sur une colonie égyptienne établie dans l’Inde. Il seroit utile d’examiner les autorités de cet écrivain, et de les renverser ou de les constater au moyen des autorités de plus grand poids auxquelles on a maintenant accès dans ces provinces. Je penche beaucoup à croire qu’il a raison, et que des prêtres égyptiens sont en effet venus des bords du Nil à ceux du Gangâ et de l’Yamounâ, que très-certainement les Brahmanes n’auroient jamais abandonnés. Ils auroient pu y venir sans doute pour chercher ou pour répandre l’instruction ; mais il paroît plus probable qu’ils visitèrent les Sarmans(168) de l’Inde, à l’instar des sages de la Grèce, plutôt pour acquérir des connoissances que pour en communiquer : d’ailleurs il n’est pas vraisemblable que les Brahmanes, qui se suffisent à eux-mêmes, les eussent reçus en qualité de précepteurs.

Quoi qu’il en soit, je suis persuadé qu’il a subsisté des relations entre les anciens peuples idolâtres de l’Égypte, de l’Inde, de la Grèce et de l’Italie, long-temps avant leur migration dans leurs divers établissemens, et par conséquent avant la naissance de Moïse. Mais la preuve de cette proposition n’affectera en aucune manière la vérité et la sainteté de l’histoire Mosaïque, qu’elle tendroit plutôt à confirmer, s’il en étoit besoin. L’envoyé divin, élevé par la fille d’un roi, et éminemment accompli sous tous les rapports, devoit connoître le système mythologique de l’Égypte ; mais il dut condamner les superstitions de ce peuple, et mépriser les absurdités spéculatives de ses prêtres, quoique quelques-unes de leurs traditions concernant la création et le déluge fussent fondées sur la vérité. Qui mieux que Socrate connoissoit la mythologie d’Athènes !