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DE L’ITALIE ET DE L’INDE.

tandis que la terre présente l’idée de l’extrême dégradation. Nous pouvons remarquer ici que la véritable histoire du monde paroît susceptible d’être divisée en quatre âges ou périodes, que l’on peut nommer, 1.° l’âge diluvien, ou l’âge très-pur ; savoir, les temps antérieurs au déluge, et ceux qui lui succédèrent, jusqu’à la folle introduction de l’idolâtrie à Babel ; 2.° l’âge patriarcal, ou pur, dans lequel il y eut sans doute de puissans chasseurs d’hommes et d’animaux, depuis l’origine des patriarches dans la famille de Sem, jusqu’à l’établissement simultanée de plusieurs grands empires par les descendais de son frère Cham ; 3.° l’âge Mosaïque, ou moins pur, depuis la mission de Moïse, et pendant que ses préceptes furent observés et exempts d’altération ; 4.° enfin l’âge prophétique, ou impur, qui a commencé aux sévères avertissemens donnés par les prophètes aux rois apostats et aux nations dégénérées : cet âge subsiste encore, et subsistera jusqu’à l’entier accomplissement de toutes les prophéties authentiques. Il faut nécessairement que la durée des âges historiques soit très-inégale et très-disproportionnée ; tandis que celle des yougs indiens est ménagée avec tant d’art et de régularité, qu’on ne sauroit l’admettre comme naturelle ou probable. Les hommes n’empirent pas dans une progression géométrique, ou à la fin de certaines périodes régulières : cependant les yougs sont si bien proportionnés, que la longueur même de la vie humaine diminue, à mesure qu’ils avancent, de cent mille ans dans une raison sous-décuple ; et de même que le nombre des principaux âvatârs de chacun d’eux décroît arithmétiquement de 4, le nombre de leurs années respectives décroît géométriquement, et forme en total la somme extravagante de 4, 320, 000 ans, qui, multipliée par 71, est la période durant laquelle on croit que chaque Menou régit le monde. Il est permis d’imaginer qu’une période semblable auroit contenté Archytas, qui mesura la terre et la mer, et compta leurs grains de sable, ou Archimède, qui inventa des chiffres capables d’en exprimer le nombre : mais la vaste intelligence d’un chronologiste indien ne connoît point de limites, et les règnes de cinquante Menous ne sont qu’un jour de Brâhmah ;