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SUR LES DIEUX DE LA GRÈCE,

raison très-peu satisfaisante : « C’est, dit-il, parce que cet étranger arriva dans un vaisseau sur la côte d’Italie » ; comme si l’on avoit dû s’attendre à le voir arriver à cheval ou à travers les airs !

Si le passage d’Alexandre Polyhistor(22), que cite Pomey(23), est réellement fondé sur une tradition antique, il répand plus de jour sur toute l’histoire de Saturne. Suivant cet auteur, il prédit une abondance de pluie extraordinaire, et fit construire un vaisseau pour mettre à l’abri d’une inondation générale les hommes, les quadrupèdes, les oiseaux et les reptiles.

Il ne paroît pas aisé d’examiner de sang-froid tous ces témoignages concernant la naissance, la famille, la postérité, le caractère, les occupations et la vie entière de Saturne, sans adopter l’opinion de Bochart, à qui cette fable paroît composée d’après l’histoire de Noé(24), ou sans la regarder au moins comme extrêmement probable. Le déluge de Noé fut le commencement d’une nouvelle ère ; et l’on peut dire qu’il a produit une nouvelle suite d’âges. Ce patriarche sortit des eaux comme s’il y avoit reçu une seconde naissance : son épouse fut réellement la mère universelle ; il lui fut promptement accordé une postérité nombreuse et florissante, pour que la terre fût bientôt repeuplée. Par conséquent, si nous offrons un roi indien de naissance divine, illustre par sa piété et sa bienfaisance, dont l’histoire semble être évidemment celle de Noé, déguisée par l’imagination asiatique, nous pouvons conjecturer en toute sûreté qu’il fut aussi le même personnage que Saturne. Ce roi est Menou ou Satyavrata, dont le nom patronymique étoit Vaivasaouata(25), ou fils du Soleil, et que les Indiens croient non-seulement avoir régné sur le monde entier dans les premiers âges de leur chronologie, mais encore avoir fait sa résidence dans le pays de Dravira, sur la côte de la presqu’île orientale de l’Inde. J’ai traduit littéralement du Bhagavat(26) le récit suivant du principal événement de sa vie ; et il forme le sujet du premier Pourâna(27), intitulé Pourâna du Matsya ou du poisson(28).

« Désirant la conservation des troupeaux et des Brahmanes, des génies et des hommes vertueux, des Vêdas(29), de la loi, et des