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JOURNAL D’UNE DAME CRÉOLE

No, Es, zot-oulé, dili, fé wé la démiselle ? (Non, je ne t’ai pas prévenue. « Pourrai-je, dit-il, voir la demoiselle ? »

— Comment ! un inconnu a osé venir demander Antoinette ! Ce n’était pas M. de Montouroy ?

No, pas mouché Montouroy, oun bel. (Non, pas M. de Montouroy, un plus bel homme).

— Et tu ne l’as pas reçu au moins. Tu n’as rien dit à Antoinette ?

No, lo ye rivé la kaz, diti. (Non, il reviendra à la maison, a-t-il dit.)

— Eh bien, tu entends : s’il reparaît ici, tu m’avertiras. Je veux apprendre à vivre à cet insolent. Et puis, écoute encore : M. de Montouroy reviendra demain, eh bien, tu ne le recevras pas.

Mouché Montouroy ! s’écria Zinga en feignant une profonde surprise.

— Oui, M. de Montouroy. Il venait beaucoup trop de monde ici. J’y mets ordre. Allons, Zinga, retirez-vous à présent.

Mais avec un empressement exagéré et comme une exubérance d’affection, Zinga s’est encore agenouillée devant mon lit et m’a couvert les mains de baisers. Puis, dénouant tout un côté de sa candale[1], elle m’a montré des pièces d’or.

Es zot-oulé vandé mo to lang. (Voudrais-tu me vendre ta langue ?)

  1. Jupe très large et courte qui s’arrête au-dessus du genou.