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LES NUITS CHAUDES DU CAP FRANÇAIS


je les ai vus, je les ai épiés, je les ai surpris, l’homme vautré sur la femme, qui le baisait, qui l’embrassait, qui le caressait comme un enfant.

— Antoinette était sotte, était bête, disait Zinga : moi, je sais toutes les caresses, les consolantes ! les endormeuses ! et celles qui font vivre en une minute des existences. Oh ! tu l’oublieras auprès de moi, je serai ta petite amie, je me ferai française pour te plaire. Vois, déjà je sais ta langue, je saurai bientôt toutes les façons des femmes de ton pays. Et tu ne te rappelleras plus même son nom.

— Tais-toi, sacrilège, tais-toi, disait-il. Oh ! ce charme, cette grâce de l’innocence, où les retrouver jamais ?

— Innocence, répliquait-elle, drôle d’innocence que celle d’une empoisonneuse !

— C’est toi, infâme ! c’est toi qui lui as conseillé cet attentat, et c’est toi qui es son assassin.

— Tant pis, disait-elle, tu l’aimeras encore cet assassin, il fera ton plaisir !

Elle avait alors mille jeux de hanches, de doigts, d’yeux et de lèvres ; son visage se transformait, éclatait en rires inattendus, sa croupe s’enfuyait comme un animal capricieux, ou s’étalait majestueuse comme un dieu lourd et despotique. Dubousquens, à ces gestes luxurieux, perdait sa tristesse, il poursuivait la négresse dans les couloirs, oubliant cette fois qu’il n’était pas seul sur le Duquesne et qu’on pouvait surprendre leurs caresses impudiques.