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JOURNAL D’UNE DAME CRÉOLE


lées et des plantations incendiées.

— Êtes-vous donc avec les révoltés, demandai-je que vous connaissez si bien leurs secrets ?

— Oh ! moi, dit-elle avec un gros rire et en se plaquant les deux mains sur la croupe, je suis seulement pour Dodue-Fleurie ! Je suis pour le parti qui triomphera, car c’est lui que je devrai dominer. Cependant je ne désire point que les esclaves réussissent. Qu’ai-je à gagner avec ces fous furieux ?

Là-dessus elle me dit adieu, et, ayant trouvé Troussot et Zozo dans l’antichambre, je repris la route des Ingas. Tous les noirs s’étaient rassemblés du côté du Morne des Capucins, et je n’eus aucune peine à sortir du Cap. J’arrivai aux Ingas comme l’aube blanchissait le ciel. Je me précipitai vers le lit d’Antoinette. Dieu merci ! elle reposait doucement, la bouche entr’ouverte et souriant de ce joli sourire qu’elle a lorsqu’elle dort. Je l’embrassai sans l’éveiller et, me couchant près d’elle, je me laissai aller au sommeil, lasse de tant d’émotions.

J’ai reconnu aujourd’hui que Dodue-Fleurie ne m’avait pas trompée, et que les périls contre lesquels elle cherche à me prémunir n’étaient point imaginaires.

Mme de Létang qui, lors de l’enlèvement d’Agathe, a cherché querelle à Mme Du Plantier, l’a insultée