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LES NUITS CHAUDES DU CAP FRANÇAIS

« Fils de prostituées, criait-il de toute sa voix, vous êtes indignes de la liberté ! Vous ne méritez que le joug dont un tyran chargera vos épaules ! »

Des huées et des injures lui répondirent.

— Voici les suites de son amour malheureux pour Zinga, dis-je.

— Oui, fit Dodue, et c’est moi qui lui ai rendu Zinga infidèle, car elle avait autrefois des complaisances pour lui. Je craignais qu’il ne devint par trop négrophile.

« Que feriez-vous si vous étiez libres, continuait Goring en élevant les mains, vous ne sauriez que vous abandonner à l’ivresse et la luxure ! »

Une clameur immense couvrit ces paroles, des noirs se jetèrent sur Goring, le saisirent, l’accablèrent de coups ; il s’engouffra dans la foule qui s’ouvrit devant lui. J’entendis des voix le menacer, puis des cris et des supplications. Enfin comme un pantin disloqué, aux loques boueuses, vint tomber agenouillé devant nous. C’était l’infortuné quaker. Figeroux, derrière lui, le poussait et le rouait de coups de pied.

— Ah ! canaille ! criait-il, tu nous as trahis.

— Je veux que vous lui fassiez grâce, dit Dodue d’une voix forte en s’interposant entre Figeroux et la victime.

À la vue de la négresse, mon commandeur et ses compagnons s’arrêtèrent, haletants, frémissants, de-