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LA VENGEANCE D’UN INCONNU

— Bah ! fit-elle, c’est du bel esprit de province. Ça ne tire pas à conséquence.

— Bel esprit, bel esprit ! cela te plaît à dire, mais ce jargon ridicule cache peut-être des intentions fort malhonnêtes. Je voudrais bien savoir quel est le malotrus qui s’est permis de t’adresser ces indécences. Je lui ferais passer le goût de t’en écrire de nouvelles.

— Laisse-donc ! Laisse-donc ! disait Thérésia. Je suis de force à me défendre d’un galantin.

— Tu les encourages par tes coquetteries, s’écriait Tallien furieux, et, il se promenait à grands pas froissant la lettre, heurtant les meubles à jeter et à briser, les uns contre les autres, les sèvres fragiles et les riens charmants de biscuit et de cristal, dont était remplie cette chambre féminine.

Mais Thérésia, toute joyeuse d’avoir ainsi chauffé au point voulu la colère de Tallien, se mettait à appeler sa femme de chambre :

— Frénelle ! Frénelle !

C’était le secrétaire, l’agent secret, l’auxiliaire de Thérésia ; d’ailleurs, comme sa maîtresse, jeune et jolie.

Elle accourut, riant déjà, le nez au vent, flairant quelque aventure.

— Frénelle, regardez la colère de mon mari, pour une misérable lettre que je viens de lui montrer ! Voilà comment il encourage ma confiance !

— Oh ! citoyen, s’écria Frénelle, essayant de prendre un air contristé, pouvez-vous gronder une femme si excellente, si dévouée !