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JOURNAL D’UNE DAME CRÉOLE


avec lui, le fouler sous son ventre en rut, dans l’effort et sous la saccade de ses fesses majestueuses.

— Quelle impudicité révoltante ! dis-je au docteur.

— Ah ! c’est une belle fille, s’écria-t-il sans m’écouter, puis comme s’il venait de deviner mon observation : Que voulez-vous, elle va à l’amour comme l’abeille va aux fleurs !

— Qu’elle aille où elle voudra, répliquai-je, elle devrait se souvenir de l’instruction que je lui ai donnée. C’était bien la peine de lui enseigner la morale !

Les baisers de Zinga ne montraient pas seulement l’obscénité abjecte de ses penchants ; ils accusaient encore un oubli plus coupable de ses devoirs envers moi. N’est-elle pas ma servante et ne me trahit-elle point en se livrant ainsi à un homme ? En vain se croit-elle jolie, — et certes je l’ai trouvée mieux que je ne l’avais jamais vue — sa beauté ne serait point une excuse, au contraire ! elle la doit à sa maîtresse, à la maison qui la nourrit et l’a faite ce qu’elle est.

Je voudrais la châtier pour lui bien montrer toute l’ignominie de sa conduite, et je n’en ai pas l’audace. Si elle parlait ! certes on ne la croirait pas, mais on pourrait me soupçonner. Je suis condamnée à supporter ses répugnantes débauches ; maîtresse, il faut me soumettre à l’esclave. Que va dire de moi le docteur, lui qui sait maintenant à quel point Zinga méprise mes ordres et son service ? Ne va-t-il pas suspecter mon indulgence, deviner le pacte criminel qui asservit ma volonté, et me rend le pantin de cette gueuse ?