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LES NUITS CHAUDES DU CAP FRANÇAIS


qui pût motiver mon pardon. La chère enfant ! j’éprouve tant de peine à lui causer le moindre chagrin ! mais je ne puis vaincre l’égoïsme cruel de mon affection. Ah ! si j’étais sûre qu’elle m’aimât, j’aurais de moins dures exigences.

Par bonheur, Antoinette n’a pas eu trop à pâtir de ma méchanceté. Ces dames, qui connaissaient l’inconstance de mon humeur, excusèrent ma brusque disparition, l’attribuant aux nerfs ou à l’orage. Profitant d’une courte accalmie, elles firent demander leurs palanquins et partirent pour le Cap en même temps que l’abbé. Seule, Agathe de Létang que le tonnerre épouvante, ne voulut pas s’en aller avec sa mère. Zinga eut alors l’inspiration, peut-être indiscrète, mais dont je lui sais gré, d’offrir à la jeune fille le lit d’Antoinette. Agathe accepta. Elles ne s’attendaient ni l’une ni l’autre à trouver fermée la porte de mon enfant. Mais Zinga ne s’émut pas de si peu. Elle devina ce qui s’était passé entre nous ; et sans crainte de ma fureur, elle vint, pendant que je dormais fouiller mes jupes, en retira la clef et délivra la prisonnière. On devine si Antoinette en eut du plaisir. À trois, elles ont organisé une petite fête. Agathe, à côté de son amie, n’a plus eu peur de l’orage ; et c’est dans toutes sortes de jeux qu’Antoinette a fini sa pénitence. Marion, la cuisinière, m’a arrêté dans le vestibule pour tout me raconter.

Après avoir terminé ses médisances, la négresse a eu un sourire de fierté comme d’un acte méritoire. Je lui ai montré mon indignation.