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PROLOGUE

LE COUVENT DES FRÈRES MINEURS


J’ai formé le dessein de vous conter la vie de Madame Nichina, qui fut belle autrefois et qui est maintenant vertueuse, bien que son corps et son visage gardent des traces honorables de leur ancienne splendeur et qu’elle ait encore le pouvoir de séduire le Diable, s’il lui plaisait.

Gentilhomme, descendant de l’illustre Vendramin, je n’eusse point songé à écrire l’histoire d’une courtisane, même repentie, et le monde eût ignoré jusqu’au nom d’une femme qui a laissé de ses grâces tant de souvenirs aux Vénitiens sans un malheur qui m’arriva aux dernières fêtes de Pâques.

Je revenais de Chioggia, au soleil couchant, et je bénissais la douceur du ciel, le calme de la mer et les vives couleurs dont la lumière mourante peignait les tours et les murailles de ma chère Venise. Jamais la vieille cité ne m’avait paru plus admirable qu’à ce moment du crépuscule où je la voyais s’élever toute