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des yeux au passage. Puis se troussant, il me montra sa virilité, toujours dressée, toujours prête aux batailles

— En voilà une qui me coûte cher, dit-il, sûrement elle me conduira quelque jour chez le Diable, si je n’y prends garde. Je voudrais me la couper comme Damascène.

— Comme Origène, tu veux dire.

— Damascène, Origène ; cela n’a pas d’importance. Allons, veux-tu baisser la tête, coquine !

— Tu lui parles ainsi qu’à une personne ?

— C’en est une aussi, et qui fait toujours sa grande dame : il n’y a pas moyen de lui résister.

Comme nous arrivions à Venise, nous passâmes devant de hautes murailles surmontées d’une croix et percées d’étroites fenêtres grillées.

— Ma sœur est supérieure de ce couvent, dit Arrivabene ; si nous allions la voir ? Il y a bien dix ans que je ne lui ai dit bonjour, et je me sens l’esprit familial ce matin.

Nous entrâmes. Une petite nonnette silencieuse, pâle et toute frêle dans ses amples voiles, aux jupes et aux pantoufles muettes, mais dont le chapelet, pendu à la ceinture, se démenait avec orgueil, nous introduisit dans une pièce vide où il n’y avait, pour amuser l’œil, que des têtes d’anges soutenant un bénitier. Au bout d’une petite heure d’attente, nous vîmes arriver, dans une robe noire, une bonne paire de joues rouges qui semblaient se retirer de devant le feu. Il en sortit une grosse voix masculine. Dès qu’il l’entendit, Arrivabene en eut les larmes aux yeux.

— C’est ma sœur, ma pauvre sœur, me dit-il, celle qui m’a sauvé de l’enfer. Une fois de plus les oraisons d’une humble et sainte fille ont touché davantage le