Elle but d’un trait.
J’allais la remercier de sa courtoisie, quand je la vis pâlir, jeter la coupe qu’elle tenait encore, porter la main à son cœur et enfin tomber lourdement sous la table.
Guido et moi, épouvantés, nous courûmes à elle, et nous essayâmes de la relever ; mais elle retombait inerte : elle ne respirait plus.
— Fasol, criai-je, venez donc ! que faites-vous !
Fasol demeurait immobile : ses dents claquaient ; il tremblait de tous ses membres.
— Qu’avez-vous, Fasol, qu’avez-vous ? répondez !
— C’est trop atroce, fit-il, c’est trop atroce !
Et, prenant la fiasque qui se trouvait devant Guido, il se versa une coupe pleine, qu’il approcha de ses lèvres. Je remarquai son mouvement et lui arrêtai le bras.
— Misérable ! dis-je en lui arrachant la coupe et en la lançant avec la fiasque dans le jardin.
— Assassin ! s’écria Guido en lui sautant à la gorge.
— Vous, dit Fasol, qui parvint à se dégager, vous n’avez pas à m’accuser ; je vous ai sauvé la vie, j’ai bien le droit de la reprendre.
— C’est toi que nous allons tuer ! m’écriai-je et je saisis un poignard.
— Tuez-moi, répétait-il, tuez-moi, vous m’avez assez fait souffrir pour que je ne tienne plus à l’existence.
Mais me ravisant :
— Nous n’avons pas besoin de ta mort. Jure-moi seulement que tu n’as pas essayé, autrement que par cette fiasque, de nous faire mourir.
Il répondit d’une voix sourde :
— J’ai été meurtrier une fois : c’est assez.