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chrétienne et attirent sur les mariages la bénédiction du Ciel ! En cette triste époque, les cœurs droits, sincères, qui désirent fonder une union selon Dieu, ne se rencontrent plus, hélas ! Croiriez-vous que j’ai un neveu, jeune homme du plus grand avenir…

— Où est donc le comte Marzio ? interrompit le cardinal.

— Marzio ! ah ! ah ! Marzio ! ah ! ah ! vous me demandez où il est ? Mais je pourrais mieux vous apprendre les occupations actuelles du pape que de vous renseigner sur les faits et gestes de ce garçon. Il est parti ce matin pour la chasse ; voilà ce que e puis vous dire. Quand rentrera-t-il ? Ce soir ou à la prochaine lune, je n’en sais rien, par la sainte Trinité ! Marzio est un citoyen qui ne nous tient pas tous les jours au courant de ses projets. Il couche chez nos gardes plus souvent que chez son oncle. S’il a le cœur dispos et que la meute soit en train, Dieu seul peut deviner quand il s’arrêtera.

L’abbé Coccone s’était approché de Paola.

— Mademoiselle aime le monde ?

La jeune fille eut un regard peureux et étonné.

— Mademoiselle aime danser ? reprit-il.

— Oh oui ! j’aime ça ! fit-elle et, dans un large rire, elle nous montra ses dents qu’elle avait assez fines, mais toutes jaunes.

— Il faut venir à Venise, mademoiselle, conclut l’abbé.

Comme on dressait la table du souper, mes craintes se réveillèrent. Je pensai que je devais ôter mon voile et que le cardinal allait me reconnaître. Par bonheur, la table était trop petite pour le nombre des convives. Je m’installai donc avec Fasol sur un escabeau, dans l’embrasure d’une fenêtre, me plaçant de telle sorte que ni Benzoni, ni Coccone ne pouvaient me voir.