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des pendues à l’étal des bouchers ; peut-être même, à la fin des fins, t’accrochera-t-on à une potence pour danser une forlane dans les airs à la lune et aux étoiles !

— Eh bien, on me pendra ! mais au moins, dans l’existence, j’aurai eu du bonheur avec cet homme-là !

— Joli bonheur !

— Dis donc, Fenice, tu fais bien ta dédaigneuse aujourd’hui, mais tu ne t’es pas toujours appelée, comme maintenant, la princesse. Je sais tes tours, va ! Ne m’a-t-on pas raconté qu’autrefois, il n’y a pas un an, on te surnommait Facchinella, le Bourrier du port, la Marinière, et qu’un jour, sur l’Arsenal, t’ayant vue causer avec un jeune matelot pour lui demander un renseignement, ton amoureux, qui n’était ni beau, ni propre, ni honnête, t’a reconduite, devant toute la foule, avec de grands coups de poing à travers le visage. Il paraît que, plus tu pleurais, plus il frappait, tu en as porté les marques pendant plus d’un mois !

Fenice était devenue blême de colère.

— Qui t’a dit cela ? Le nom, vite, le nom de cette gouape, que j’aille lui plaquer ma main sur la figure et mon pied dans le ventre !

— Est-ce que je me rappelle ! Mais plus de deux cents femmes assistaient à la scène.

— Ô indignité ! Imagine-t-on de telles histoires sur son prochain. Je voudrais la connaître, la fabricante de pareils contes ! Je lui dirais qu’elle a commis un mensonge gros comme toi, gros comme elle, gros comme la terre entière !

— Dis-le donc à ta grand’maman, puisque c’est elle qui nous contait cela un jour, à ma tante et à moi, en pleurant, la pauvre femme ! toutes les larmes de ses yeux.

— Grand’maman ferait bien mieux de s’occuper de