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oh ! cette puanteur, cette infection d’homme, je la sentirai donc partout !

— Pauvre petite ! soupira Cecca.

Elle me prit le bras et, malgré ma résistance, m’entraîna jusqu’à la salle de bain. Toutes deux nous descendîmes ensemble avec délices dans l’eau vierge, dans l’eau purificatrice.

En sortant du bassin, elle répandit sur elle et sur moi un flacon de parfum, puis me baisa la bouche ; et nos seins, nos ventres unis jouaient à se caresser.

— Eh bien ! Nina, dit-elle, est-ce que je sens le mâle toujours ?

Comme ses lèvres me furent douces cette nuit !

Elle n’habitait point d’abord avec nous, mais à cause de son affection pour moi, elle avait obtenu de la comtesse de s’installer dans ma chambre. Je fus heureuse de sa compagnie. Après la brutale caresse des hommes, la sienne me consolait en me faisant oublier. Mais je la payais d’ingratitude et de colère. À ces lents et attentifs baisers, je ne répondais que par les emportements de mon amour trompé. Quand elle m’embrassait de toute sa force, quand elle pénétrait en moi de tout son désir, je pressais, j’appuyais sa tête contre ma chair comme pour l’étouffer ; si elle me tendait son corps, je ne savais que le mordre et le déchirer. Pourtant il y avait dans nos étreintes un moment d’abandon mutuel, d’exquise défaillance, où je ne savais si c’était Cecca, Guido ou Dieu enfin qui était en moi. À cause de cet instant je pardonnais à Cecca sa passion, sans l’encourager. Lorsqu’elle se relevait, les yeux vagues, fatiguée, ravie de ma jouissance, plus humble qu’une esclave, je me rappelais combien elle était dure envers les hommes.

— Va-t’en, lui criais-je, tu es ridicule.