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Des murs fanés, où de la vigne en fleur s’alcôve,
Avec la bonne odeur des jasmins violets,
Sur le coin de ciel bleu qu’on voit, retombent les
Capucines ouvrant l’or de leur gueule fauve,
Et dont la tige s’est enroulée aux volets.

Et les buveurs s’accroupissant en poses veules,
Les doigts à leur moustache où du vin perle au long,
Sentent, les yeux emplis d’une âpre flambaison,
Comme grandit aux champs, le soir, l’ombre des meules,
Le vin épanouir en eux sa déraison.

Leurs gestes font, comme un grand vent, s’enfler leurs blouses
Neuves, sur leur poitrine aux rousses velaisons,
Telles, alors qu’y vient la rouille, les pelouses ;
Et les plus jeunes gars ont des fiertés jalouses
De leur sexe qui les destine aux garnisons.

Bientôt ils seront tout en rouge avec des casques
Miroitant les matins de fête et dont tout l’or
S’emplume ; ils traîneront bientôt le sabre aux basques,
Heureux des éperons de fer, heureux encor
Des yeux de femme les veillant comme un trésor.