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CHARLES BAUDELAIRE

Le noir du costume aidant, le geste retenu, méticuleux, concassé, rappelait les silhouettes successives du télégraphe optique qui se démantibulait alors sur les tours de Saint-Sulpice, ou mieux, la gymnastique anguleuse de l’araignée, par temps humide, au bout de son fil…[1].

§

Des soucis matériels viendront bientôt arracher Baudelaire aux bénéfices de la vie contemplative et à ses pratiques d’ascétisme mondain. Deux ans lui suffiront pour dissiper la moitié de sa petite fortune. Ses parents, alarmés, le font interdire. Alors commence son douloureux calvaire. Il doit abdiquer ses préventions d’amateur, de dilettante, et demander à la littérature ses moyens d’existence. Ses scrupules d’artiste, son souci de la perfection, qui ne lui permettent de travailler qu’à ses heures, compliqueront singulièrement sa tâche. L’originalité de ses productions inquiète les éditeurs et les directeurs de journaux. Ses gains restent dérisoires. On sait qu’il ne retirera de la première édition des Fleurs du mal (1857), en tout et pour tout, que la misérable somme de deux cent cinquante francs[2].

  1. Nadar, Op, cit.
  2. Voici, à titre de curiosité, le contrat d’édition des Fleurs du Mal :

    « Entre MM. Poulet-Malassis et Eugène de Broize, imprimeurs