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Ceux-là, l’heure venue où le portier les lâche,
Revomis aux fraîcheurs des trottoirs attablés,
S’égaillent, d’un pied leste, allégés de la tâche,
Dans les jardins, de rire et d’orchestres mêlés.

D’aucuns, feutre en bataille, avec des singeries
De chic, la cigarette aux dents, monocle à l’œil,
Miment les Lovelace au fond des brasseries
Et s’y carrent d’un geste enluminé d’orgueil.

D’autres, vibrant d’éclats de fête et de théâtres,
S’arrêtent, dans le bruit des crieurs de journaux,
À chaque librairie où les piles jaunâtres
S’entassent du poème et des romans nouveaux.

Tous sûrs de retrouver, au soir, la chaude étreinte
Du foyer, les rideaux de bien-être assoupis,
La nappe appétissante et l’alcôve aux fleurs peintes,
Où mille songes bleus gazouillent mi-blottis.

Cependant que, parqués dans les salles d’étude
Où la lèpre des murs champignonne à foison,
Les Internés, fourbus d’atroces lassitudes,
S’écœurent sur Manille, Aristote ou Nason.