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Chaque arbre a ses humeurs. Tous ont leur préférence.
Le val, d’où se dégage un brouillard au matin,
Voit croître le troène et le tremble incertain ;
Le saule d’un lac pur aime la transparence,
Le cyprès les tombeaux, l’olivier la Provence,
Et c’est aux lieux tonnants que trône le sapin.

Je vous aime, tilleuls à l’ombrageuse voûte,
Je vous aime, îlots frais, que les platanes font
En Été, sur la place, où l’eau chante, à Toulon,
Et je vous aime aussi, peupliers sur la route
Où court la diligence et qui tressaille toute,
En Flandre, aux claquements de fouet du Postillon !


IV


 
Ma nourrice en filant me contait vos histoires,
Bois profonds ! vos trésors surveillés d’un dragon,
Vos carrefours sonnant du bruit des chasses noires,
L’étang couleur de perle où l’Elfe danse en rond ;
Vos détrousseurs armés de pistolets d’ivoire,
Mes nuits d’extase rouge en gardaient un frisson.